Deux mots-quatre paroles à propos de l'amendement Lurel

Il a été fait grand bruit médiatique autour de l'amendement, porté par Victorin LUREL, député de la Guadeloupe, visant à condamner à 45.000 euros d'amendes toute personne qui nierait l'esclavage des Noirs ou le mettrait en doute. Selon l'ex-président du conseil régional, cette mesure est une nouvelle victoire qui s'inscrit dans le sillage de celle qui a vu le vote, en 2006, de la fameuse loi TAUBIRA qualifiant l'esclavage en tant que "crime contre l'humanité". En fait, pour non négligeables qu'ils soient, la loi TAUBIRA et l'amendement LUREL ne font que reprendre une démarche mise en œuvre par la communauté juive après la seconde guerre mondiale. Moins d'une quinzaine d'année après la fin de cette dernière, on avait vu apparaître, en effet, des théories dites négationnistes c'est-à-dire niant que "la destruction des Juifs d'Europe", selon le titre d'un ouvrage du grand historien étasunien Raul HILBERG, se soit réellement produite. C'était là insulter la mémoire de 6 millions d'Européens de confession juive, dits "Ashkénazes", internés dans des camps en Allemagne et exterminés dans des chambres à gaz. (Petite parenthèse et par comparaison : rien de tel ne s'est produit dans le monde arabe où, à la même époque vivait 10 millions de Juifs orientaux dits "Séfarades").
Si cette loi anti-négationniste a eu un effet, indéniablement positif en tenant en respect les nostalgiques du nazisme et en faisant condamner ceux qui avaient le culot de nier l'existence de Dachau et d'Auschwitz, elle a eu malheureusement aussi un double effet pervers au cours des trois décennies qui viennent de s'écouler : voir de l'antisémitisme partout d'une part ; assimiler l'antisionisme à de l'antisémitisme, de l'autre. S'agissant du premier effet, on peut s'en tenir à cette déclaration humoristique de l'Abbé PIERRE : "Il suffit de dire qu'un Juif chante faux pour qu'on soit aussitôt qualifié d'antisémite !". S'agissant du deuxième effet, il est pratiquement interdit de critiquer un état qui, par décision, datant de 1948, d'une ONU qui ne comptait à l'époque que des pays occidentaux, s'est constitué sur le dos du peuple palestinien, peuple à propos duquel Nelson MANDELA disait cette chose terrible : "Tant que les Palestiniens ne seront pas libres, nous, les Noirs sud-africains, nous ne seront pas réellement libres !".
Il ne faudrait donc pas que la loi TAUBIRA et l'amendement LUREL aboutissent, eux aussi, à pareils travers. Voir de la négrophobie partout est dangereux et crée les germes d'une future guerre civile dans une France où désormais vivent, et vivront pour toujours, près d'"1 million de "Français noirs", descendants de deuxième ou troisième génération d'immigrés antillais, guyanais, réunionnais et négro-africains. Ces personnes ne reviendront pas vivre aux Antilles, à la Réunion ou en Afrique et encore moins leurs enfants. Ils se doivent donc de trouver un modus vivendi avec leurs compatriotes blancs afin de ne pas recréer le système de ghettoïsation et de guerre civile larvée qui sévit aux Etats-Unis. Cela signifie très précisément que les humoristes doivent pouvoir critiquer les Noirs, les politologues critiquer l'action de ceux qui sont élus, les critiques littéraires démolir tel ou tel mauvais livre écrit par un (e) Noir (e) ou les journalistes sportifs lancer des piques à des sportifs noirs dont les prestations ont déçu etc...
La loi TAUBIRA et l'amendement LUREL sont donc à saluer, mais ne doivent pas être utilisés à tout bout de champ, à tort et à travers, car il y a le risque de sombrer dans le chantage mémoriel permanent...